Pour se rafraîchir la "mémoire"

KARTOGRAPHIA est un dispositif cartographique numérique participatif, qui a pour but de révéler la mémoire de nos mouvements dans la ville. Le projet relie simultanément l’espace urbain à l’espace d’exposition, les déplacements à la carte, l’individu à la communauté. Comme je l’avais exposé lors de mon précédent article, une application mobile devait être créée afin de traquer et d’enregistrer les différents rythmes, parcours et déambulations de chaque participant se déplaçant à pied. Ils devaient ensuite être traités, retranscrits (sous la forme de traces graphiques colorées, personnalisées et dynamiques) puis assemblés, afin de contribuer à une cartographie subjective et collective du mouvement. Seuls les résultats de ces trajectoires apparaissent sur la carte, s’entremêlant et re-dessinant à leur façon l’architecture et les méandres de la ville, au travers d’une projection en temps réel.

Afin d’aboutir à la réalisation d’un projet fonctionnel, j’avais donc sollicité Makina Corpus pour un échange de compétences et l’apprentissage de nouvelles techniques au travers d’un stage de fin d’études. Celui-ci arrive d’ici peu à son terme, c’est donc l’occasion pour moi de revenir sur les grandes étapes qui ont participé à son édification.

Les grandes étapes du projet

KARTOGRAPHIA nécessitait donc trois interventions majeures, à savoir : la création d’une application mobile, d’un serveur de stockage et d’un algorithme de rendu.

Durant ces trois derniers mois l’essentiel de mon implication s’est porté sur la recherche et la programmation de cet algorithme de rendu visuel, afin de transformer visuellement les informations relatives aux utilisateurs (localisation, vitesse, durée). Pour ce faire, j’ai eu recours à l’utilisation de D3, bibliothèque JavaScript me permettant l’affichage de données numériques sous une forme graphique et dynamique.

Dans un premier temps, j’ai cherché à reproduire l’aspect esthétique des tracés tel que je l’avais imaginé en amont. Ainsi, je suis d’abord parvenue à obtenir un tracé courbe, puis à le démultiplier en plusieurs lignes accolées afin de reproduire un effet de « mouvement de pinceau ». Je me suis ensuite attelée à rendre compte d’une modification de ce dernier en fonction de la vitesse de déplacement de son utilisateur. De ce fait, lorsque l’allure devient semblable à celle d’une course à pied, les lignes qui composent une même trajectoire se rejoignent pour n’en former qu’une ; d’un point de vue général le tracé s’amincit selon les accélérations et se délie lorsque le rythme redevient constant. À ce propos, je tiens à préciser à nouveau que le projet contraint ses participants à marcher et non pas d’avoir recours à un quelconque véhicule, auquel cas le résultat ne représente plus les variations du déplacement.

Dans un second temps, je me suis occupée de personnaliser ces différentes trajectoires. D’abord de manière totalement aléatoire grâce à une bibliothèque de couleurs que je m’étais confectionnée, en vue qu'elles soient ensuite sélectionnées par l'utilisateur lui-même. Puis, j’ai cherché à leur donner une opacité en fonction de l’écoulement du temps, plus le déplacement est récent, plus la couleur est vive, plus il est ancien plus il s’éclaircit. Non seulement le participant est invité à confronter son corps à l’espace environnant, mais également à jouer avec le temps.

Chacun de ces paramètres a d’abord été testé avec des données fictives, jusqu'à ce que l'algorithme soit directement connecté au serveur et qu'il bénéficie ainsi de l'apport de véritables données. En effet, parallèlement à mon travail, Makina Corpus s’est chargée de développer le serveur et l’application mobile de mon projet, grâce auxquels j’ai pu procéder à de nombreux tests, plus réalistes. Ces phases d’intégrations m’ont permis de constater des dysfonctionnements que je n’avais pas anticipé à la source. Ainsi j’ai du procéder à de nombreux ajustements dans le but de trouver un résultat plus équilibré et homogène. J’ai notamment été contrainte de modifier certains calculs à plusieurs reprises, ainsi que la vitesse, la fréquence de captation ou encore la zone de visualisation ; ces paramètres n’étant pas correctement réglés, ils venaient altérer à tour de rôle l’esthétique du rendu.

Présentations et représentations

Lorsque je suis enfin parvenue à un résultat satisfaisant et proche de ce que j’avais imaginé, j’ai convoqué toute l’équipe de Makina Corpus Toulouse à participer à une phase de tests collective, le lundi 11 avril. Cet événement a été particulièrement profitable et l’occasion pour moi d’observer les réactions et d’écouter les remarques d’un public plus averti auprès des techniques numériques, mais pas nécessairement aguerris face à une cartographie purement artistique. Chaque retour a été très constructif et m'aidera à rendre le projet plus pratique et attractif.Mouvements de l'équipe Makina Corpus Toulouse, le 11 avril 2016, aux alentours du 36 rue Jacques Babinet.

Très prochainement, j’exposerai mon projet lors du Fablab Festival, les 6, 7 et 8 mai 2016. Pour les curieux c'est l'occasion idéale de venir tester mon dispositif et de découvrir l'univers des Fablabs et de nombreux autres projets innovants !