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Modèles économiques du logiciel libre - 3/3
Les logiciels libres sont accessibles gratuitement, pour autant certains se construisent aussi avec une logique marchande. Nous vous présentons ici l'état du marché du logiciel libre, et l'économie créée autour.
Free as in free speech, not as in free beer
Avant d'évoquer les différents modèles économiques, rappelons que les logiciels libres ne sont pas nécessairement gratuits. Le code source est accessible à tous (respect de la liberté 2 des logiciels libres), mais les entreprises sont libres de commercialiser leurs solutions.
Makina Corpus développe des applications libres innovantes avec des briques réutilisables. Certaines applications "métier" sont destinées à un client qui décide d'ouvrir le code ou non, d'autres logiciels libres sont disponibles à tous les utilisateurs potentiels. Makina Corpus propose aux entreprises intéressées de personnaliser et d'installer les logiciels libres qu'elle développe comme Geotrek, GeoRivière, TerraObs, TerraVisu et OppServe.
État des lieux
Infographie de l'enquête CNLL 2021 : présentation des résultats clés de l'enquête sur la filière open source.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, il est pertinent de dresser un tableau de l'état du marché du logiciel libre et de l'open source en France. Comme le présente l'infographie de l'enquête du CNLL menée en 2021, les entreprises de l'open source ont de beaux jours devant elles.
En 2020 déjà, l'étude de Teknowlogy pour le CNLL, Syntec Numérique et Systematic révélait des chiffres prometteurs pour le domaine de l'open source. Le chiffre d'affaire progressait plus de deux fois plus vite que la marché IT dans son ensemble. Sur le schéma ci-dessus, nous constatons également que les entreprises de l'open source réalisent en moyenne 20,5% de leur chiffre d'affaires hors France, contre 16,7% dans le secteur du numérique. De plus, la France est bien située sur le marché européen. En 2020, l'étude évoquait une croissance de 8,6% de son marché IT sur une année, contre 7,6% pour le Royaume-Uni et 8,2% pour l'Allemagne.
Ces données expliquent notamment pourquoi la France ressent aujourd'hui une faiblesse dans le recrutement : alors que le nombre de postes dans l'open source augmente, il reste encore trop peu de personnes formées dans ce domaine. C'est d'ailleurs ce que souligne le Labo Société Numérique du gouvernement :
Le secteur est porté par une croissance de 9% : une dynamique qui devrait se poursuivre jusqu’en 2023 avec 8,5% de croissance annuelle, en moyenne prévue, 60 000 personnes sont actuellement employées en équivalent temps plein dans les entreprises spécialistes de l’Open Source. […] Malgré une offre que l’OPIIEC caractérise comme « abondante et protéiforme en France », seuls 5 % des étudiant.e.s en informatique reçoivent une formation spécifique.
En bref, le domaine de l'open source connaît une croissance importante et les organismes commencent à œuvrer pour proposer plus de formations ou en tout cas, faire plus de liens avec les entreprises de l'open source.
Valeur économique du logiciel libre et de l'open source
Le modèle économique d'une entreprise ou d'un secteur permet de définir la valeur qui va être délivrée. Dans la plupart des cas, la valeur émane de la rareté de la ressource. Or, dans le cas du logiciel libre la notion de rareté ne réside pas dans le produit en lui-même, mais dans les services autour et dans la compétence. Globalement, dans l'économie du libre c'est l'humain qui est au centre, de par ses compétences et le temps de travail passé sur l'outil, et non plus le produit ou le service offert.
État des lieux de la filière Open Source en France 2020 / 2021
Dans les entreprises de logiciel libre, il existe trois types d'acteurs économiques : les sociétés de service, les sociétés éditrices et les communautés. Ces trois acteurs peuvent fonctionner conjointement. Ainsi, une société de service peut aussi être une société éditrice. Les entreprises et les communautés peuvent échanger et faire grandir le logiciel ensemble, comme c'est le cas avec la suite logicielle open source Geotrek.
Chaque organisation est ensuite libre de choisir le degré d'ouverture du logiciel, notamment en jouant sur les licences du logiciel libre (cf. article : "Licences des logiciels libres").
Dans le cadre du logiciel libre, le code source ouvert ne peut pas être vendu.
L'entreprise peut également choisir d'ouvrir une partie de son code et de vendre certaines fonctionnalités qui pourront, ou non, être ouvertes par la suite. Cette pratique a plusieurs avantages. Tout d'abord, elle peut permettre d'offrir une certaine confidentialité au client. Ensuite, côté prestataire, cette formule lui permet de rentabiliser le développement de nouvelles fonctionnalités et donc de permettre l'innovation. Dans ce cas de figure, la vente se fait sur la fonctionnalité ainsi que sur les services autour du logiciel et de la fonctionnalité en question.
Modèles économiques des éditeurs de logiciels libres
Modèle de complémentarité
D'après Dahlander (2005, "Appropriation and appropriability in open source software"), le modèle de complémentarité ou "bundle" est le plus répandu. Ce dernier distribue le logiciel libre gratuitement et l'éditeur va générer des revenus sur les prestations de services payants : développement, intégration ou formation. Parfois, le logiciel libre sera gratuit, mais un logiciel complémentaire sera payant. La plupart du temps, le logiciel libre est la base du socle, il est capable de répondre à un besoin simple. Le logiciel complémentaire lui, vient proposer des évolutions, de nouvelles fonctionnalités.
Lorsque l'éditeur propose des logiciels complémentaires payants, cela offre au client la possibilité de demander des évolutions à un autre prestataire, dès lors que ce dernier a les compétences requises pour le faire.
Modèle de double licence
Un produit peut être proposé sous deux licences en même temps, une open source et une propriétaire. Autrement dit, les utilisateurs voulant créer un logiciel open source peuvent utiliser la licence open source copyleftée. Un entreprise quant à elle peut utiliser la licence propriétaire ce qui lui permet de fermer le logiciel propriétaire qu'elle crée.
Grâce à ce modèle, les avantages du logiciel libre peuvent être liés à la génération d'un revenu. Avec la licence libre, le logiciel peut s'améliorer, évoluer et être diffusé. La licence propriétaire permet elle au prestataire de percevoir un revenu lié à la concession de la licence. À noter, ce modèle peut être utilisé exclusivement par des éditeurs qui produisent des composants libres.
Modèle de mutualisation
Ce modèle crée une communauté d'utilisateurs qui peut aussi contribuer financièrement pour améliorer le logiciel.
La suite logicielle Geotrek en est un exemple concret. La création de Geotrek s'est faite avec le Parc national des Écrins et Makina Corpus. Ensemble, les fonctionnalités nécessaires à la création du logiciel ont été identifiées lors d'ateliers collaboratifs. Ensuite, d'autres acteurs ont rejoint le projet comme des parcs nationaux et naturels, des Communautés de Communes, des offices de tourisme, des Régions, etc. Toutes les améliorations et nouveaux développements utilisés par la communauté sont mis à la disposition de tous. Régulièrement, les contributeurs de Geotrek sont rassemblés pour déterminer les prochaines évolutions. Ces évolutions sont ensuite publiées et documentées par Makina Corpus et ses contributeurs.
Conclusion
Le logiciel libre bénéficie de plusieurs modèles qui s'adaptent en fonction du besoin de l'utilisateur.
Les modèles économiques des éditeurs de logiciels libres évoluent au fil du temps comme nous le montre l'infographie du CNLL (ci-dessus). De plus, nous pouvons observer dans celle-ci que le modèle de service ralentit alors que celui de l'édition est en nette progression, avec par exemple le modèle de livraison SaaS ou le système cloud.
Tout laisse penser que le logiciel libre est prêt pour la suite : ses licences et modèles économiques s'adaptent à différentes situations, et le gouvernement œuvre de plus en plus pour favoriser son expansion en commençant par faciliter son insertion dans les administrations.
En savoir plus :
Découvrez le reste de la série dédiée aux logiciels libres :
- Licences des logiciels libres - 1/3
- Logiciel libre : promotion nationale et implication de l'état - 2/3
Source
- Wikipédia : Commercialisation du logiciel libre
- Aful : modèles économiques des logiciels libres
- CNLL : les modèles économiques des logiciels libres
- Wikipédia : Modèles économiques des logiciels open source
- April : modèles économiques
- Présentation des modèles économiques du Logiciel Libre et de l'association PLOSS RA - Clément OUDOT
- CNLL : Infographie de l'enquête de 2019
- Labo Société Numérique du gouvernement : L’offre de formation française en Open Source a besoin d’être mise à jour et complétée
- InfoDSI : L’Open Source, une filière deux fois plus dynamique que l’ensemble du marché numérique français
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